Soutenir tous ceux qui "prennent soin"

Soutenir tous ceux qui

Mettre « des mots sur des maux »

Article rédigé par Martine Demanet, responsable formation au sein de la Fédération de l'Aide & des Soins à Domicile

Nous traversons une période inédite dans l’histoire de notre société.

Les professionnels de l’aide et des soins à domicile ont été confrontés, comme tous les soignants, à des situations inhabituelles. En quelques heures, il a fallu organiser autrement le travail, faire face à un virus encore jamais rencontré et donc mal connu, remplacer les malades dans les équipes, faire face à l’angoisse des patients et des bénéficiaires, gérer le quotidien professionnel tout en restant attentif à sa famille qui, elle aussi, a dû s’organiser pendant le confinement…

Tout cela, dans un contexte où les professionnels du domicile ont été laissés pour compte dans la distribution de masques et autres matériels nécessaires et où les médias n’ont que très peu évoqué leur situation.

Accompagner les personnes dépendantes, malades du Covid-19 ou non, en ne sachant pas soi-même si on est porteur(s)e de la maladie est sans aucun doute difficile à vivre consciemment ou inconsciemment.

Bref une période stressante, particulièrement anxiogène et des moments d’insécurité et d’inquiétude.

Pourtant la grande majorité des professionnels ont continué à travailler, solitaires dans leurs interventions mais solidaires au sein des équipes, des services, des centres !

Dès que les choses permettront un temps d’arrêt et de réflexion, il est clair qu’il faudra en parler, mettre « des mots sur des maux ».

Nous pensons que deux situations peuvent se dégager des temps de crise, en admettant d’ailleurs qu’elles peuvent coexister l’une et l’autre chez une même personne :

- La prise de conscience d’un choc émotionnel : la personne présente un stress post-traumatique, témoin d'une catastrophe ayant concerné de nombreuses victimes (*). Cette situation réclame en premier lieu une écoute bienveillante de la part de la hiérarchie.

- L’apparition de symptômes inexpliqués tels que troubles du sommeil, angoisses, anxiété, diminution du goût de vivre... sans conscience d’un choc émotionnel. Cette situation risque de passer inaperçue puisqu’elle n’est pas exprimée mais peut être découverte à l’occasion d’un partage en équipe ou lors d’une formation.

S’ajoutent à ces situations, une crainte (existante aussi dans le cas d’autres maladies) de contaminer ses proches ainsi qu’un sentiment de peur ou d’angoisse latent au vu des informations reçues par le biais des médias, les chiffres cités (davantage de morts aujourd’hui aux USA que lors de la guerre du Vietnam ! ...).

La crise sanitaire doit nous donner l’occasion d’écouter le vécu des travailleurs : comment se sont-ils sentis « soutenus ou abandonnés », quelles ont été les plus grandes difficultés rencontrées, quels moyens mettre en œuvre pour éviter la reproduction de mauvaises surprises, etc.

L’encadrement a joué un rôle essentiel de soutien, de présence, d’encouragement.

Il a fallu relayer les informations, transmettre des consignes précises, faire appliquer des procédures, favoriser le partage de responsabilités pour les décisions difficiles, ménager du temps pour se soutenir entre collègues, trouver les moyens de remplacer les malades, écouter l’inquiétude des patients, des bénéficiaires, des familles… Les cadres de proximité, les directions auront sans doute aussi besoin d’échanger, de partager.

Tous ceux qui prennent soin ont démontré de grandes capacités d’adaptation et de flexibilité malgré les difficultés considérables cumulées. Ils sont en position de résistance sur le plan personnel et psychique pour maintenir leur efficience et leur engagement professionnels.

À moyen et à plus long terme, ce que nous apprendra cette crise sanitaire sur la vulnérabilité à la souffrance psychologique de nos professionnels et de ceux qui les encadrent, devrait nous aider à renforcer les stratégies de prévention. Celles-ci pourraient s'appuyer notamment sur un renforcement de la formation aux enjeux psychologiques de l’aide et des soins, de la relation, du management et de la gestion des situations de crise.

Des formations, supervisions, temps d’inter vision, seront mis en œuvre dès septembre. Le programme de formation 2021 sera construit avec un regard sur cette crise.

Aujourd’hui, si une souffrance est repérée, il est impératif de faire appel aux cellules de soutien qui ont été proposées.

Demain et après-demain, ce sera à nous de prendre soin, plus que jamais de tous nos précieux professionnels du domicile  !

Car c’est ENSEMBLE & grâce à vous que nous resterons toujours là ENSEMBLE & pour vous !


(*) 9.505 décès  - 17.323 hospitilisations, comptabilisés en Belgique à la date du 2 juin 2020

source : https://www.info-coronavirus.be/fr/